Contexte

Le 26 février 2020, le Conseil fédéral a pris acte des résultats de la consultation et a adopté le message relatif à la modification du Code de procédure civile (Amélioration de la praticabilité et de l’application du droit). Cette révision prévoit notamment la possibilité pour les tribunaux de procéder à des actes de procédure oraux en recourant à des moyens électroniques de transmission du son et de l’image. En d’autres termes, cette révision permettra de recourir à la vidéoconférence.

Les références à la vidéoconférence étaient encore peu nombreuses dans le projet. Les débats aux chambres ont permis de compléter ce dernier afin de parvenir à une législation plus aboutie, même si un certain nombre de questions restent encore en suspens.

Les modifications du CPC entreront en vigueur le 1er janvier 2025. À partir de cette date, les autorités civiles pourront recourir à la vidéoconférence pour interroger les parties, auditionner les témoins ou permettre aux experts de présenter leurs rapports. Le recours à la vidéoconférence sera en revanche exclu dans le cadre de l’audition d’enfants, en application de l’art. 298 al. 1bis CPC-modifié.

Il n’existera en revanche pas de droit, pour les justiciables, à obtenir qu’une audience soit tenue par vidéoconférence. Les tribunaux demeureront en effet libres d’en faire usage ou non selon la formulation potestative de la loi (art. 141a CPC-modifié).

Le 14 février 2024, le Conseil fédéral a mis en circulation le projet d’Ordonnance sur le recours à des moyens électroniques de transmission du son et de l’image dans les procédures civiles (OMETr). Cette ordonnance définit les conditions techniques et les exigences concernant la protection et la sécurité des données, qui doivent être respectées en cas de recours à des moyens électroniques de transmission du son et de l’image pour accomplir des actes de procédure oraux dans les procédures civiles (art. 1 OMETr). L’objectif visé est louable et l’élaboration de ce projet doit être saluée, mais il aurait sans doute été préférable de mettre en place un système clé en main. Un tel système aurait toutefois nécessité des coûts importants. Il est par conséquent uniquement prévu que les tribunaux demeureront libres d’utiliser le matériel et les logiciels de leur choix pour autant qu’ils soient appropriés (art. 2 al. 1 let. a OMETr) et que les exigences sur la protection et la sécurité des données soient respectées (art. 3 OMETr).

Éléments principaux

Le principe prévu est que le tribunal peut, d’office ou sur demande, procéder à des actes de procédure oraux en recourant à des moyens électroniques de transmission du son et de l’image, notamment à la vidéoconférence, ou peut autoriser les personnes concernées à participer à la procédure par ce biais si la loi ne l’exclut pas et que toutes les parties ont donné leur accord (art. 141a CPC-modifié). La question a fait débat aux chambres et il a finalement été décidé que le consentement des parties devait être exigé pour qu’une audience soit tenue par vidéoconférence.

Il existe encore un débat doctrinal sur la question de la nécessité du consentement des parties lorsque seul le témoin est auditionné par vidéoconférence. Nous estimons que le consentement des parties prévu à l’art. 141a CPC-modifié relatif aux principes applicables en cas de recours à la vidéoconférence est nécessaire, y compris pour l’audition de témoins (MARIOT SANDRA, Le recours à des moyens électroniques de transmission du son et de l’image [audience par vidéoconférence) selon le CPC révisé, in : RSPC 1/2024, p. 111 ; voir également HOFMANN ]DAVID/LÜSCHER CHRISTIAN, Le code de procédure civile, 3e édition, Berne 2023, p. 190). D’autres auteurs considèrent que la disposition relative à l’audition de témoins, qui ne mentionne pas la nécessité d’obtenir le consentement des parties, est une lex specialis (DOMEJ TANJA, Videokonferenzen im Zivilprozess, Revue de l’avocat 2022, p. 488) ou qu’elle peut être interprétée indépendamment de l’art. 141a CPC (GIROUD SANDRINE/RAETZO NOÉMIE, Audience civile par vidéoconférence, in : PVEF 64/2023, p. 361).

Lorsque la comparution personnelle est prévue, en sus du consentement des parties, aucun intérêt public ou privé prépondérant ne doit s’y opposer (art. 141a al. 1 CPC-modifié).

Certaines conditions doivent être remplies, en application de l’art. 141b CPC-modifié, pour que le recours à la vidéoconférence soit admissible. Il est notamment nécessaire que :

  • le son et l’image doivent parvenir simultanément à tous les participants ;
  • les auditions, interrogatoires et dépositions soient enregistrés ;
  • la protection et la sécurité des données doivent être garanties.

Lorsqu’un enregistrement est effectué, des règles spécifiques sont prévues quant à l’élaboration du procès-verbal, étant entendu que l’enregistrement est versé au dossier (art. 176a CPC-modifié).

Le recours à la vidéoconférence ne doit pas porter atteinte au principe de publicité. Il est donc prévu que lorsque les débats sont publics, le tribunal doit permettre aux personnes qui en font la demande de les suivre sur place ou par le biais de moyens électroniques. La question de la nécessité ou non de faire une demande préalable n’a pas encore de réponse claire, car l’OMETr et plus précisément sont art. 9, dans sa version actuelle du moins, semble en contradiction avec l’art. 141a al. 3 CPC-modifié.

Conclusions

Il faut saluer l’ajout de la possibilité pour les tribunaux de recourir à des moyens électroniques de transmission du son et de l’image dans les procédures civiles, dans le CPC, tout comme l’élaboration de l’Ordonnance y relative.

La réflexion dans son ensemble n’a toutefois, à notre sens, pas été menée jusqu’à son terme et plusieurs questions restent en suspens.

Il conviendra par conséquent de rester attentif aux futures évolutions dans ce domaine – notamment s’agissant de l’éventuelle modification de l’OMETr par le Conseil fédéral en fonction des résultats de la consultation – et aux arrêts que rendra le Tribunal fédéral quant aux cas d’application des dispositions relatives à la possibilité pour les tribunaux de recourir à la vidéoconférence. La loi n’étant en effet pas forcément toujours très précise, du moins sur certains éléments (comme sur la nécessité ou non d’obtenir le consentement des parties lorsque seul le témoin est auditionné par vidéoconférence), nous devrons nous référer, le cas échéant, à la jurisprudence.

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SNSF assistant in the Chair of Civil Procedure and Law of Legal Professions at the Faculty of Law of the University of Neuchâtel and lawyer in Neuchâtel, with a particular interest in the impact of new technologies on civil procedure, whether it is its dematerialization or its automation.